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IGEM Evry 2014

Policy and Practices

Design in Synthetic Biology: rationality versus kludge


Kludge : "klumsy, lame, ugly, dumb, but good enough"
Inelegant but successful solution to a problem.

Une biologie formalisée


L'analogie avec les sciences de l'ingénieur

Les définitions de la biologie de synthèse sont multiples, et peuvent être significativement différentes suivant la personne à qui on la demande. Cependant on peut retrouver certains éléments communs à la plupart de ces définitions, comme l'analogie entre la biologie de synthèse et les sciences de l'ingénieur. Cette analogie est basée sur l'idée que la nouvelle discipline biologique permet de synthétiser des éléments standardisés du vivant, dont on connaît les propriétés et les fonctions, et permet également de les assembler selon un protocole rationnel et transposable d'un système à l'autre ; on doit de plus pouvoir prédire et modéliser le comportement de l'organisme synthétique ainsi obtenu. Construire de nouveaux systèmes vivants devrait donc devenir à terme aussi simple que d'assembler des composants non-biologiques dans une machine.

En 2005, une commission européenne rassemblant des experts de la biologie de synthèse a ainsi proposé la définition suivante :

“Synthetic biology is the engineering of biology: the synthesis of complex, biologically based (or inspired) systems which display functions that do not exist in nature. This engineering perspective may be applied at all levels of the hierarchy of biological structures – from individual molecules to whole cells, tissues and organisms. In essence, synthetic biology will enable the design of ‘biological systems’ in a rational and systematic way.”
High-level Expert Group European Commission


On remarque dans cette définition la confiance des biologistes sur le caractère rationnel et systématique du design des nouveaux systèmes : comme dans les design de machines ou de programmes informatiques dans les sciences de l'ingénieur, chaque partie de l'ensemble est parfaitement caractérisée et se comporte de façon prévisible. On peut alors assembler ces composants ensemble pour obtenir le résultat désiré.

La prédictibilité supposée des systèmes issus de la biologie de synthèse est également mentionnée par SynBERC :

"As envisioned by SynBERC, synthetic biology is perhaps best defined by some of its hallmark characteristics: predictable, off-the-shelf parts and devices with standard connections, robust biological chassis (such as yeast and E. coli) that readily accept those parts and devices, standards for assembling components into increasingly sophisticated and functional systems and open-source availability and development of parts, devices, and chassis.”
SynBERC

Les êtres vivants sont généralement vus comme des créatures aux comportements imprévisibles, où les interactions entre chaque composants entre eux et avec le milieu extérieur sont tellement complexes que l'on n'est pas capables de rendre compte entièrement de chaque phénomène survenant dans les organismes, et que de nombreuses propriétés doivent être considérées comme émergentes face à notre incapacité à les réduire à un mécanisme causal simple. Il est alors légitime de se demander comment la biologie de synthèse peut prétendre pouvoir synthétiser de manière rationnelle et prévisible des systèmes biologiques, comme le décrivent les deux définitions ci-dessus.


Comment est-il possible de construire rationnellement un système biologique ?

On est aujourd'hui capables de synthétiser un grand nombre de composants d'une cellule simple, et de les assembler pour construire des systèmes qui se comportent comme des cellules vivantes naturelles. Mais le composant le plus souvent transformé et synthétisé est l'ADN, ou du moins certaines séquences du génome des organismes : en effet, l'essentiel des propriétés des êtres vivants est codé dans le génome, aussi c'est en modifiant l'ADN que l'on peut parvenir à construire des systèmes biologiques avec de nouvelles fonctions. Dans la branche de la biologie de synthèse qui conçoit et construit des systèmes basés sur la synthèse et l'assemblage d'ADN, comme par exemple à iGEM, les composants standardisés qui sont utilisés sont les parts du Registry of Standard Biological Parts du MIT. Ces parts sont des séquences d'ADN dont la fonction est connue : il suffit théoriquement d'intégrer ces parts dans un organisme vivant pour qu'elles lui fournissent la fonction prévue. Grâce au catalogue de parts du Registry, décrivant des centaines de séquences géniques avec leurs fonctions, les biologistes de synthèse disposent d'un très grand nombre d'outils standardisés, qu'ils peuvent combiner dans un système biologique afin de les faire se comporter comme ils le veulent. Ces séquences d'ADN ressemblent ainsi à des outils hautement caractérisés et facilement transposables d'un système à l'autre. Dans un de ses articles, le journaliste Dan Ferber rapporte ainsi les paroles de Drew Endy du MIT, qui explique que le Registry est comparable à l'inventaire que des ingénieurs en électricité pourraient consulter lorsqu'ils conçoivent un nouvel outil. Le Registry permet d'avoir à disposition des pièces standardisées, sensées fonctionner dans la plupart des châssis utilisés en biologie synthétique (Ferber 2004).

Ce sont grâce à ces parts synthétisables que nous créons, caractérisons et utilisons à iGEM, ainsi qu'aux autres composants des cellules qui ont été pareillement caractérisés et standardisés, que la biologie de synthèse prétend pouvoir synthétiser des systèmes biologiques de façon rationnelle et prévisible.


Outre l'utilisation d'éléments standardisés, la rationalisation de la biologie passe également par une méthode prise aux ingénieurs, souvent distinguée en quatre phases : conception, synthèse, implémentation et validation. La première étape, de conception du système, utilise des outils mathématiques et informatiques afin de faire un modèle du système, et de simuler son fonctionnement par programmation informatique. Les éléments du système sont ensuite synthétisés ou construits, grâce aux outils du génie génétique et, de plus en plus, à des synthétiseurs d'oligonucléotides. Le système est implémenté en utilisant des outils de la biologie moléculaire et de la génétique, et finalement l'étape de validation se sert de nouveau d'outils mathématiques pour vérifier que les résultats correspondent à ceux attendus lors de la simulation – le cas échéant, le modèle mathématique est recalibré. C'est cette méthode de conception et de construction rationnelle que les biologistes de synthèse tendent à reproduire dans leur discipline.

Les chercheurs partagent de plus la volonté de formaliser et normaliser leurs modèles, afin qu'ils puissent être facilement réutilisés dans des conditions différentes, ou par d'autres équipes. C'est pourquoi par exemple dans le Registry, toutes les parts soumises le sont sous la même forme : la séquence d'intérêt doit être entourée de deux séquences flanquantes – préfixe et suffixe – possédant des sites de restriction précis ; le tout est placé dans un plasmide portant un gène de résistance à un antibiotique. Ce modèle de construction permet aux chercheurs d'utiliser ensuite systématiquement les mêmes techniques pour se servir de toutes les parts, ce qui en simplifie grandement l'assemblage. ... ...